7 Questions à Claudie Titty Dimbeng
Bonjour Dimbeng, vous êtes un artiste peintre né en Côte d'Ivoire, installé à Paris depuis bientôt 34 ans maintenant, quel est votre parcours ?
Je suis née d'une mère franco-ivoirienne et d'un père ivoirien, dont les fonctions m'ont amené à vivre ma petite enfance en Allemagne et mon adolescence en Autriche. Après avoir été diplômée du Lycée français de Vienne en 1986 et avoir suivi une classe préparatoire aux arts à l'Académie Charpentier, j'ai étudié l'architecture d'intérieur à l'Ecole Supérieure des Arts Modernes de Paris. Lorsque j'ai décidé en 1999 de me consacrer pleinement à la peinture, j'ai été formée par les peintres Valérie Gervais N'dri et Valentin Caro.
Parlez-nous du concept de votre art ?
Mes territoires d'origine, d'adoption et de passage m'ont amené à créer Mixed Art Relief, un concept artistique qui met en valeur mes origines et favorise le dialogue interculturel. Cela se fait à travers une technique mixte, inspirée du Vohou Vohou, qui utilise des matériaux tels que le tapa (tissu d'écorce) et le raphia pour créer une œuvre abstraite ou figurative. La fusion des matières et de la peinture, principalement l'huile, crée une matière organique qui me relie à la nature et à la terre.
Claudie Titty Dimbeng est connue pour peindre des œuvres dont le thème central est la femme, pourquoi avoir choisi ce thème pour vos œuvres ?
Les femmes, et notamment les afro-descendants, car elles subissent une double discrimination liée à leur sexe et à leur couleur de peau ; les femmes parce qu'elles sont victimes de violences au point d'être utilisées comme arme de guerre ; les femmes parce qu'elles sont les piliers, elles portent l'humanité et parce qu'elles sont le début, la source et la fin.
J'ai consacré 3 séries exclusivement aux femmes, sur le thème du Gynécée, que je définis comme un espace d'échange, d'apprentissage et de sororité autour de notre rôle au sein de la famille, de notre place dans la société et de notre contribution à la construction du monde, ainsi que ainsi que notre plaisir et notre sexualité.
J'aborde également notre impact sur la planète, la spiritualité africaine et les enjeux liés à l'actualité, comme dans la série « Derrière l'eau » sur les drames liés à la migration, « L'Ivresse » réalisée lors du 1er confinement, ou encore « La Goutte » qui suit le meurtre de George Floyd.
Vous avez exposé dans plusieurs pays, en Côte d'Ivoire, en France, notamment au siège de l'UNESCO, en Inde, en Norvège, etc. Que retenez-vous de ces différents lieux où vous avez exposé ?
Chaque voyage, à travers des rencontres humaines, artistiques et culturelles nourrit mon être, ma réflexion et mon travail, et contribue ainsi à enrichir le Relief d'Art Mixte. Ce dont je retiens, c'est la puissance de l'art comme langage universel, à travers le regard de mes œuvres, et l'émotion qu'elles suscitent. La peinture est un moyen d'expression primordial qui me permet de transmettre ma vision du monde dans des pays aussi divers et distincts que ceux que vous évoquez.
Selon vous, comment devient-on un artiste à succès ?
Je n'ai pas de recette pour être un artiste à succès, mais je peux partager avec vous quelques réflexions sur le fait d'être un artiste. Les artistes sont les transmetteurs de rêves ou de réalités que nous révélons ou subliment. Le but pour moi est de transmettre de l'émotion à travers des thèmes qui touchent, et à travers un style et un univers qui m'est propre.
Être artiste, c'est 1% d'inspiration et 99% de travail.
Avez-vous un mentor?
Il y a une quinzaine d'années, j'ai rencontré Valentin Caro, un peintre et écrivain espagnol qui vit à Paris depuis plus de 30 ans, tout comme moi. Il m'a formé à certaines techniques de peinture, notamment le sfumato et la réalisation du plâtre. J'étais très fière d'exposer à ses côtés en 2015 pour l'exposition "Le premier homme était une femme" à Bab's Galerie, mais je le considère toujours comme mon mentor, car il me pousse constamment à m'améliorer et à me remettre en question.
Quels sont vos projets actuels ?
Je travaille actuellement sur une série qui a débuté avec l'envie de sortir de mon cadre habituel, conséquence du premier confinement. Le point de départ est une expérience qui consiste à peindre par gravité par des jets de peinture à 15 mètres de hauteur. Ce deuxième confinement aura non seulement un impact sur la finalisation de ces tableaux, mais il me projette également vers mes prochaines séries, avec une envie de connexion à la nature et aux éléments.
Côté expositions en 2021, je participerai à la Sussex Art Fair avec ma galerie londonienne Demif Gallery, et un programme est en cours avec la galerie LouiSimone.
Tout cela est soumis à l’évolution de la situation sanitaire liée à l’épidémie de Covid 19.